« La chopine de Schopenhauer » – Cédric Demangeot
Titre

« La chopine de Schopenhauer » – Cédric Demangeot

description

il y a dans une vie
fatalement une heure

où la tête démolie
tombe en poussière

entre les mains d’un vieil enfant
paralysé d’effroi

il est l’heure
alors

de lire
schopen-

hauer, peut-
être

il
est l’

heure
(l’hauer)

(l’horr-)
eur d’é

teindre,

teindre la lumière en
noir,

noir

comme la bière
philosophique allemande

comme le sang qui tourne en cage dans la
chopine de schopen
haeur,

il est l’heure de

mouiller les lèvres de
mousse noire,

mousse comme venue
des profondeurs,

cette bière a le goût
des morts, de la mort

il est l’heure de

boire,

comme si le corps n’avait
pas de fond,

comme on sent bien
qu’il n’en a pas – boire

jusqu’à la dernière goutte la
barrique d’horrible b

ière,

: hier

ç’a été l’
heure de cela :

la mousse la
moustache de
la mère de
schopenhauer

qu’on trempe un beau matin comme une tartine
dans le bol ou l’encrier de sang

l’heure
& la bière, les deux

tièdes comme un corps vivant,

il faut se retenir
de vomir sinon le meilleur

est perdu

l’amer

à boire, l’écume
empoisonnée, la lie

défaite,

le livre ouvert
sur la table de la cuisine,

à côté de la bouteille
de bière philosophique

vide,

le livre ouvert comme les veines

du n-ième disciple ivrogne de
schopenhauer dans sa cuisine

avec sa mère,

avec sa mère en travers
de son suicide,

avec le livre en travers
du chemin de la vie

(possible non-possible)

en travers de la vie
pour accompagner la vie,

pour accompagner l’enfance au cimetière
des éléphants philosophiques

(le livre dans une poche, la bouteille de bière
dans l’autre : bagages)

non, pas le livre, la

vie – oui – é

teindre,
teindre la lumière en

noir : apprendre
à aimer – oui – aimer

pour ce qu’il est l’horrible monde

et recommencer.