‘Ta Pragmata’ (extrait 1) – Fanny Torres
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‘Ta Pragmata’ (extrait 1) – Fanny Torres

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4. Pour certaines personnes, la langue, ramenée à son principe essentiel est une nomenclature, c’est-à-dire une liste de termes correspondant à autant de choses. Cette conception est critiquable à bien des égards : elle suppose des idées toutes faites préexistant au mot. Mais nous savons bien que les idées ne préexistent pas à leur mise en forme par la langue. Il n’y a pas de manque dans la nature, le manque supposant un sujet le dénonçant et regrettant l’absence d’une chose : tout comme il n’y a d’espace que peuplé, il n’y a d’idées qu’énoncées.
5. Bref, cette conception laisse supposer que le lien qui unit un nom à une chose est une opération toute simple, ce qui est bien loin d’être vrai. Cependant, et toute proportion gardée, cette vue simpliste peut nous rapprocher de la vérité, en nous montrant que l’unité linguistique est une chose double, faite du rapprochement de deux termes…
(je présente une feuille A4 que j’essaie de dédoubler)
…unis dans notre cerveau par le lien de l’association.

6. Oui, le signe linguistique unit non une chose et un nom mais un concept et une image acoustique : si sans remuer les lèvres ni la langue, nous pouvons nous parler à nous-mêmes, c’est parce que les mots de la langue sont pour nous des images acoustiques associées aux concepts.

7. Or, on donne le nom de concept à toute représentation symbolique, de nature verbale, ayant une signification générale qui convient à toute une série d’objets possédant des propriétés communes. Un concept donnant lieu à une conception, à une manière particulière de voir les choses, par agencement d’images et d’idées, un concept est une humeur. Un concept serait une disposition affective passagère d’une personne, liée souvent aux circonstances.

8. C’est en ce sens que le lien unissant le signifié au signifiant est arbitraire, ou, puisque nous entendons par signe (A4) le total résultant de l’association d’un signifiant et d’un signifié, nous pouvons dire plus simplement : le signe linguistique est arbitraire et pourtant motivé. Nous sommes cependant d’accord, les signes n’en sont pas moins fixés par une règle et c’est cette règle qui oblige à les employer et non leur valeur intrinsèque/individualisée.

9. Et, pour l’expression, pour permettre la transmission (nous évoquons ici le fantasme de la conversation explicite), ces associations sont ratifiées par le consentement collectif : l’écriture (dictionnaire) peut fixer ces associations dans des images conventionnelles,

10. tandis qu’il serait impossible de photographier dans tous les détails les actes de parole. C’est cette possibilité de fixer les choses relatives à la langue qui fait qu’un dictionnaire et une grammaire peuvent en être une fidèle représentation,

11. la langue étant le dépôt des images acoustiques, et l’écriture la forme tangible de ces images. Nous admettons ici que la langue est déjà représentation.